Dans l’univers fascinant de la photographie de mode et publicitaire, un nom se démarque par sa créativité débordante et son approche unique : Grégoire Alexandre. Né en 1972 à Rouen, ce photographe français a su transformer le studio photo en un véritable terrain de jeu, où l’imagination n’a de limite que les quatre murs blancs qui l’entourent.
L’alchimiste de l’image
Diplômé de l’École Nationale Supérieure de Photographie d’Arles, Grégoire Alexandre a rapidement attiré l’attention du monde de la mode et de la publicité. Sa particularité ? Une capacité extraordinaire à créer des mondes parallèles au sein même du studio, en utilisant des moyens étonnamment simples.
Imaginez un instant un homme qui, armé de scotch, de fonds en papier et d’accessoires de studio tels que polyboards, girafes et réflecteurs, parvient à construire des univers entiers. C’est précisément ce que fait Grégoire Alexandre, transformant chaque séance photo en une véritable performance artistique.
Le studio comme organisme vivant
Pour Alexandre, le studio n’est pas un simple espace de travail, c’est un organisme vivant en perpétuel mouvement. Il observe ses cycles, consigne les “après” et les “à-côtés” des prises de vue. Là où d’autres photographes cherchent à dissimuler la mécanique derrière l’image, Alexandre en fait le personnage principal de ses créations.
Son approche est un ballet constant de construction, déconstruction et reconstruction. Il pousse les limites de l’équilibre, empilant et assemblant jusqu’au point critique, parfois allant jusqu’à tout casser pour mettre à nu le squelette même du studio. C’est dans cette danse avec les contraintes qu’il trouve sa liberté créative.
L’art de la contrainte
Grégoire Alexandre fait de la contrainte son alliée. Les quatre murs blancs du studio et le temps limité des commandes publicitaires ou éditoriales deviennent pour lui un cadre stimulant, une sorte d’Oulipo photographique. Cette approche lui permet d’ouvrir le champ des possibles plutôt que de le restreindre.
Que ce soit un vêtement de créateur, une montre ou un sac, l’objet au cœur de la commande devient entre ses mains le point de départ d’une narration visuelle unique. Avec quelques ficelles, un éclairage judicieux et des accessoires qui s’invitent subrepticement dans le cadre, Alexandre crée des mondes parallèles empreints de poésie et de fable.
Une signature visuelle unique
La simplicité des moyens utilisés par Grégoire Alexandre contraste avec la complexité des images qu’il produit. Ses compositions, souvent fragiles et tenant littéralement à un fil, ont inscrit une écriture sensible dans le paysage de la photographie de mode. Loin des excès des années 90, son travail distille des sentiments poétiques à travers des images épurées et ordonnées.
On retrouve dans son portfolio des natures mortes de vêtements effeuillés comme les pages d’un livre, des mannequins ensevelis sous le rose d’un cyclo, ou encore des lacets de couleurs noués aux branches d’un arbre. Chaque image est une invitation à plonger dans un univers où la réalité se plie aux caprices de l’imagination.

Reconnaissance et expositions
Le talent de Grégoire Alexandre n’a pas tardé à être reconnu. Sélectionné pour le Festival International de Mode et de Photographie de Hyères en 2003, il a depuis collaboré avec des magazines prestigieux tels que Wallpaper*, Esquire UK, et Vanity Fair. Son travail a également séduit le monde de la musique, l’amenant à travailler avec des artistes comme Etienne Daho et Metronomy.
En 2009, il reçoit le Prix HSBC pour la Photographie, une reconnaissance qui s’accompagne d’expositions personnelles à Paris, Lille, Metz et Marseille. Son travail a également été exposé à l’international, notamment à la Photographers’ Gallery de Londres et au French Institute Alliance Française de New York.
L’exposition “Orange bleue sur fond blanc”
L’une des expositions les plus marquantes de Grégoire Alexandre, “Orange Bleue sur Fond Blanc : Uchronies en Studio”, présentée au Centre photographique de Rouen en 2015-2016, offre une plongée fascinante dans son processus créatif. Cette exposition, articulée en deux volets, conjugue photographie et installation, révélant l’étendue de son talent et sa capacité à repousser les limites du médium photographique.
Grégoire Alexandre est donc bien plus qu’un simple photographe de mode ou de publicité. Il est un véritable artiste qui a su faire du studio photo son terrain d’expression privilégié. En transformant les contraintes en opportunités créatives, il nous rappelle que la magie de la photographie réside autant dans le processus que dans le résultat final. Son travail nous invite à voir au-delà de la surface des choses, à découvrir la poésie cachée dans les plis d’un vêtement ou dans l’ombre d’un réflecteur. Dans un monde saturé d’images, Grégoire Alexandre nous offre une pause, un moment de contemplation où l’ordinaire devient extraordinaire, où le studio devient un univers infini de possibilités.
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