Peu d’auteurs ont eu un impact aussi profond et durable sur un genre littéraire que J.R.R. Tolkien sur la fantasy. Avec des chefs-d’œuvre comme Le Seigneur des Anneaux et Le Silmarillion, cet universitaire britannique a non seulement popularisé le genre auprès du grand public, mais a aussi posé les fondations de ce qu’on appelle aujourd’hui la “high fantasy” ou fantasy héroïque.
Près de 50 ans après sa mort, l’influence de Tolkien reste omniprésente dans les romans, les films, les jeux vidéo et bien d’autres médias de fantasy contemporains. Son œuvre magistrale continue d’inspirer et de défier les auteurs, qui tentent d’égaler sa vision riche et ambitieuse ou de s’en démarquer. Retour sur l’héritage sans précédent du “père” de la fantasy moderne.
Bâtisseur de mondes d’exception
L’un des accomplissements majeurs de Tolkien a été la création de mondes secondaires d’une profondeur et d’une complexité jamais vues auparavant. De la cartographie méticuleuse de la Terre du Milieu aux langues inventées comme le sindarin ou le quenya, en passant par les cultures, religions et histoires détaillées des différentes races comme les Elfes, les Nains ou les Hobbits, Tolkien a érigé un cadre aussi riche qu’un monde réel.
Cette étendue de création a défini les standards de la “haute” fantasy héroïque qui se déroule dans des univers secondaires complexes, aux antipodes du merveilleux “léger” des contes de fées. Les auteurs contemporains comme George R.R. Martin, Brandon Sanderson ou Robert Jordan ont tous été inspirés par le niveau de détail prodigieux atteint par Tolkien dans ses mondes.
La quintessence du voyage de l’héroïsme
Au cœur de l’œuvre de Tolkien se trouve une épopée classique sur le voyage et la quête de l’héroïsme. Que ce soit Bilbo ou Frodo dans leur périple pour détruire l’Anneau Unique, leurs aventures épiques au travers de paysages grandioses ont défini de nombreux tropes de la fantasy moderne, de la formation d’une “compagnie” de héros aux affrontements contre des forces du mal redoutables.
Cette formule du “voyage du héros” a été maintes fois reprise et réinventée, que ce soit dans Le Roi Scorpion de George R.R. Martin, les Royaumes Oubliés de R.A. Salvatore ou les Annales du Disque-Monde de Terry Pratchett. Mais l’ombre de Tolkien plane toujours sur ces récits initiatiques, qui lui doivent une fière chandelle.
L’ère du merveilleux
Une autre part cruciale de l’héritage de Tolkien est son don pour renouveler le sens du merveilleux. Ses descriptions poétiques et ses créations mythiques uniques, des Ents aux Balrogs, ont profondément réenchanté l’imaginaire collectif, réinventant la fantasy dans une forme à la fois familière et étonnamment nouvelle.
Cette redéfinition du “sense of wonder” ou sentiment d’émerveillement transparaît dans les œuvres des grands noms actuels du genre, qu’ils cherchent à émuler Tolkien comme Brandon Sanderson avec son cosmère ésotérique, ou à apporter leur propre touche de magie comme N.K. Jemisin dans sa fascinante trilogie de Terre Fracturée.
D’autres auteurs contemporains ont plutôt choisi d’emprunter une voie différente, en réinventant le genre dans un style plus sombre ou mature, à l’opposé de Tolkien. L’univers crépusculaire et désillusionné du Trône de Fer de G.R.R Martin, ou les récits frankement grimdark de Joe Abercrombie peuvent être vus comme une déconstruction mordante du merveilleux tolkienien.
Quoi qu’il en soit, rares sont les écrivains fantasy d’aujourd’hui qui peuvent ignorer totalement l’ombre monumentale de J.R.R. Tolkien, considéré à juste titre comme le père et l’inspiration première d’un genre devenu incontournable. Son legs créatif, bien que parfois contesté, n’en reste pas moins une source intarissable de merveilleux pour des générations d’auteurs et de lecteurs à venir.