En 1832, alors qu’une épidémie de variole ravageait Vicksburg, Mississippi, un modeste hôpital vit le jour entre ce qui est aujourd’hui le centre-ville et le Parc Militaire National. Personne ne pouvait alors imaginer la succession de tragédies qui allait marquer son histoire.
Des débuts sous le signe du drame
Les premières décennies de l’établissement furent marquées par le sang de la Guerre Civile. L’hôpital, devenu un refuge pour les soldats blessés, connut un premier tournant tragique en 1878. Une épidémie de fièvre jaune décima le personnel soignant : seize médecins et six Sœurs de la Miséricorde périrent en tentant de sauver leurs patients. Le nombre exact de victimes parmi ces derniers reste à ce jour un mystère.
Malgré ces épreuves, l’établissement persévéra. En 1910, il accueillit la première faculté de médecine de l’Université du Mississippi et ouvrit une aile dédiée aux vétérans confédérés. Mais le destin semblait s’acharner : en 1918, un mystérieux incendie, dont l’origine n’a jamais été élucidée, ravagea une grande partie de l’annexe.
Un éphémère âge d’or
Le premier véritable coup de chance survint en 1954, lorsqu’un homme âgé nommé Lee Kuhn légua sa fortune de 400 000 dollars à l’hôpital. Cette manne financière permit l’expansion de l’établissement, rebaptisé en son honneur. L’hôpital se diversifia, accueillant une prison à sécurité minimale au quatrième étage, tandis que l’annexe des vétérans confédérés se spécialisait dans les troubles mentaux. Une section baptisée “Pest House” fut dédiée aux maladies infectieuses.
Le début de la fin
Cette renaissance fut de courte durée. En 1989, en raison de problèmes politiques et financiers, l’hôpital ferma ses portes. Pendant plus de deux décennies, le Kuhn Memorial resta abandonné, ses bâtiments se délabrant inexorablement. Comme tant d’autres lieux désertés, il devint le terrain de jeu des chasseurs de fantômes et des curieux, attirés par son passé tumultueux.
L’ultime drame
En juin 2015, l’histoire du Kuhn Memorial prit un tournant encore plus sombre. Deux chasseurs de fantômes, venus explorer les lieux, firent une découverte macabre : le corps de Sharon Wilson, une femme de 69 ans portée disparue depuis seulement douze heures. L’enquête révéla qu’elle avait été assassinée dans l’enceinte même de l’hôpital. Deux suspects furent rapidement appréhendés au volant de sa voiture, mais les circonstances exactes du crime restent à ce jour un mystère.
Le dernier chapitre
David Childers, co-fondateur du Mississippi Paranormal Research Institute, qui avait mené plusieurs investigations dans l’hôpital, approuva la décision de démolition prise en 2015. L’état du bâtiment, avec ses puits d’ascenseur béants, sa moisissure noire et son amiante, représentait un danger mortel. Comme il le confia au Clarion Ledger : “Certains esprits doivent simplement être laissés en paix.”
La démolition programmée pour août 2015 marqua la fin physique du Kuhn Memorial. Pourtant, son histoire continue de hanter l’imaginaire collectif. Plus qu’un simple hôpital, il incarne la façon dont certains lieux semblent attirer inexorablement les tragédies, comme si les murs eux-mêmes étaient imprégnés des drames qu’ils ont abrités. Dans les rues de Vicksburg, on murmure encore que même si le bâtiment a disparu, les âmes qui y ont souffert continuent de hanter les lieux, témoins silencieux d’un siècle et demi d’histoire médicale américaine.